09ème séance, samedi 1er décembre : premier passage de pointe, premier dégagement.

9ème séance

Introduction

Aujourd'hui, pour la première fois, les élèves vont devoir attaquer en passant leur pointe de l'autre côté de la lame adverse. On appelle cela une attaque par dégagement, tout simplement. L'apprentissage de cette action arrive après 8 séances au cours desquelles ils n'ont fait qu'aller tout droit, soit en attaque simple, soit en riposte. Cela a permis à la main de se placer. Effectivement, il faut une bonne position de lame pour effectuer un dégagement et comprendre la logique de la porte qui ferme une entrée mais en ouvre une autre dans laquelle on peut s'engouffrer. Ce serait stupide de partir d'un engagement de sixte et de demander à l'un des deux partenaires d'effectuer un dégagement. Stupide car les tireurs, mêmes confirmés, sont très rarement dans cette position pendant un match. Par contre, les débutants font souvent des recherches de fer inutiles lorsqu'ils sont en assaut. Soit pour se rassurer soit parce qu'ils ne traitent pas encore bien l'information et interprètent une marche pour une attaque, ce qui donne une parade faite beaucoup trop tôt. C'est sur une recherche de fer, exagérément large comme nous le verrons ci-dessous, que je vais aborder le thème de l'attaque par dégagement.

Les fondamentaux

Répéter, toujours répéter pour fixer les positions une fois pour toute, et qu'on ne soit pas embêté dans un an par des pieds qui ne seraient pas bien en équerre. Il faut en profiter maintenant alors qu'ils sont encore malléables. Dans quelques mois, les postures vont se figer... les bonnes comme les mauvaises. Le débutant est une pâte à modeler qui durcit au fil du temps. Les défauts qui sont faciles à corriger lors de la première partie de la saison deviennent ensuite plus difficiles à gommer.

Je reprends la situation de la semaine dernière sur les marches avec reprise d'appuis simultanées. C'est pas mal ce qu'ils font mais on va répéter la même chose au moins jusqu'aux vacances de Noël.

Pour faire passer une séance de fondamentaux qui est toujours un peu rébarbative, il faut varier les exercices et essayer de proposer des versions chaque semaine un peu différentes. Aujourd'hui, on finit par "faites ce que je dis mais pas ce que je fais". Ils doivent se concentrer sur le signal auditif et non pas le signal visuel. Je suis face à eux, je dis "marchez" en faisant un geste les invitant à aller vers l'avant et en reculant moi-même. Si je dis "rompez", je le dis en faisant un geste les invitant à reculer et en avançant moi même. Mais quelquefois, je vais inverser. Je vais dire "marchez" en faisant les mêmes gestes que je faisais lorsque je disais "rompez". C'est à eux de ne pas se laisser influencer par ce que je fais et à se concentrer sur ce que je dis et arriver discriminer les signaux. Bien sûr, la semaine prochaine, nous ferons le contraire : "faîtes ce que je fais mais pas ce que je dis".

La séance

Les temps de regroupements et d'exercices sont entrecoupés d'assauts normaux (sans contraintes).

a) S'habituer à prendre contact avec la lame adverse par une recherche de fer

Je veux que les élèves qui vont provoquer l'action offensive s'entraînent à trouver le fer de leur partenaire afin de permettre à ce dernier d'effectuer un l'attaque par dégagement.

Aujourd'hui, ce dégagement va être un dérobement au contact. Si je commence par un dérobement au contact, c'est parce que si j'entamais l'approche de cette situation directement avec un contre-dégagement (sans aucun contact de fer), certains élèves exécuteraient une recherche de fer peu réaliste, leur lame passant au-dessus de la pointe du partenaire. De plus, celui qui doit effectuer le passage de pointe pourrait le faire trop tôt ou trop tard. Le fait de commencer par du contact permet aux élèves de prendre des repères comme le fait de savoir où se trouve la lame de leur partenaire dans l'espace et de bien comprendre le principe de "la porte qui se ferme mais va en ouvrir une autre".

Nous allons donc, pour commencer, travailler uniquement cette recherche de fer, rien d'autre. Les élèves sont regroupés derrière leur ligne de mise en garde :

"Pour l'exercice que nous allons voir maintenant, l'un des deux partenaires va avoir la pointe posée sur le sol. On n'est jamais comme ça en assaut, c'est juste pour l'exercice. Il va faire avec sa lame comme un arc-en-ciel et aller la poser sur celle de son partenaire et la pousser un peu." Le mot "arc-en-ciel" permet de donner une image précise de la forme du geste à accomplir. Bien sûr, il ne sera pas accompli entièrement car il s'arrêtera lorsqu'il rencontrera la lame du partenaire.

Le mot "poser" vient indiquer qu'il n'y a pas de mouvement brusque, le terme "pousser" est là pour bien faire comprendre qu'une porte est en train de se fermer.

Enfin, je pose la question : "est-ce que celui qui fait ce mouvement (recherche de fer) fait une parade ?"Certains ont dit "non", d'autres étaient plus dubitatifs. "Est-ce que son camarade l'attaque ?" ; "non, il ne bouge pas" ;"Alors il ne fais pas de parade, puisqu'il n'y a pas d'attaque."

Les élèves se mettent deux par deux, je désigne un rang devant faire le mouvement de "l'arc-en-ciel", ils le font tous ensemble lorsque je donne le signal.

Voir vidéo 1

b) L'attaque par dégagement : lorsqu'une porte se ferme, une autre s'ouvre.

On reprend la situation vu plus haut. Je fais venir un élève, je fais la recherche de fer et met en contact ma lame avec la sienne. "Lorsque je touche le fer de mon adversaire et que je le pousse un peu, est-ce qu'il peut quand même m'attaquer et me toucher ?" Certains ont répondu oui, d'autres non. J'ai demandé à ceux qui ont répondu "non" :"pourquoi il ne le pourra pas ?" "Parce qu'il ne pourra pas passer". Je demande à l'élève d'attaquer...on voit bien qu'il ne peut pas toucher, la porte étant fermée. "Effectivement, il ne peut pas passer par là, pourtant il peut prendre un autre chemin...Là où c'est ouvert..." "De l'autre côté..." "Effectivement, si je ferme une porte, j'en ouvre une autre...par laquelle on peut entrer..."Je demande à l'élève d'attaquer en passant de l'autre côté, de rentrer par là où c'est ouvert. Voilà ce que vous allez faire : quand votre partenaire viendra toucher et pousser votre fer, vous attaquerez en passant de l'autre côté." On montre rapidement que c'est préférable de passer sa lame par dessous la coquille plutôt que par dessus le fleuret adverse, même si c'est possible. Je ne montre pas le coupé aux petites catégories car, mal fait, la pointe va se retrouver menaçant le plafond. Même un peu large, le dégagement à l'avantage de laisser à peu près la pointe vers la cible. Je donne une autre consigne qui ne sera pas forcément respectée aujourd'hui car elle est difficile pour des débutants : "touchez en même temps que vous posez le pied avant..." mais il faut commencer à en parler. En effet, jusqu'à présent, le travail que l'on a fait sur l'attaque leur a donné l'habitude d'allonger le bras d'abord, en dissociant les mouvements bras-pieds. En escrime, le travail de coordination que cela nécessite est "contre-nature". Dans la vie de tous les jours, on se rapproche d'abord avec ses jambes des objets que l'on veut saisir puis on tend légèrement le bras pour les attraper. En escrime, au contraire, pour créer la suprise et réussir à toucher l'autre, il faut trouver sa distance, tendre le bras très vite et compenser immédiatement le reste de la mesure avec une fente. Pour un débutant, il n'est pas facile de réussir un tel enchaînement. L'extension du bras permet d'aller toucher très vite l'adversaire sans lui laisser la possibilité de réagir. Un retard du bras, un départ anticipé des jambes va donner un signal à l'adversaire qui lui permettra de réagir. L'attaque simple doit donc toujours être rapide et surprenante. Cela justifie aussi le fait de prendre le chemin le plus court lors du dégagement : au ras de la coquille adverse.

Vidéo 2

c) Attaquer par coup droit ou par dégagement ?

Nous terminons le cours par une situation d'incertitude. Pierre et Antoine sont à distance de marche et fente. Antoine à la pointe par terre, comme dans la situation de début. Pierre effectue une marche pour se rapprocher, Antoine décide de ne pas bouger ce qui justifie l'attaque par coup droit ou alors d'effectuer une recherche de fer, ce qui justifie l'attaque par dégagement. Attention, Antoine doit prendre sa décision pendant la marche. Encore une fois, le signal volontairement exagéré de la recherche de fer permet à l'attaquant de mieux traiter l'information et le met dans une position de réussite.

Voir video 3 (je viens de me rendre compte que je n'ai pas enregistré le moment où il fait le coup droit dans la situation d'incertitude)

Bien sûr, dans les prochaines séances, le signal deviendra plus réaliste, ce qui permettra d'introduire les notions de "sixte", de "quarte", de "coup droit" et de "dégagement".

La semaine prochaine, nous verrons le dégagement (ou contre-dégagement) sans contact de fer et mettrons l'accent sur un passage de pointe "au ras de la coquille adverse".

Rédigé par Première année d'escrime

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